Thèses
Infection urinaire et uropathie malformative chez l’enfant
Les uropathies malformatives sont des anomalies congénitales du rein et du tractus urinaire (appareil urinaire). Elles sont dominées par le reflux vésico-urétéral et sont une cause majeure de morbidité chez l’enfant.
L’infection urinaire est plus souvent le mode de révélation des uropathies malformatives. Elle se manifeste, chez l’enfant et particulièrement chez le nourrisson, par des tableaux cliniques divers rendant son diagnostic difficile.
L’objectif de notre investigation était d’étudier l’écosystème bactérien dans les infections urinaires sur uropathie malformative de l’enfant afin de contribuer à l’amélioration de leur pronostic.

Méthode
Il s’agit d’une étude transversale descriptive qui s’est déroulée dans le service de chirurgie pédiatrique du centre hospitalier et universitaire (CHU) de Treichville (Abidjan, Côte d’ivoire). Cette enquête retrospective a concerné des enfants âgés de 0 à 16 ans, pris en charge pour une infection urinaire sur uropathie malformative entre Janvier 2015 et Décembre 2020.

Nos résultats
Notre étude a porté sur 28 enfants présentant une uropathie malformative et les résultats sont les suivants :
- Les uropathies malformatives représentaient 2% des motifs de consultation dans ce service de chirurgie pédiatrique ;
- 36 % des cas d’uropathie malformative étaient asssociées à une infection urinaire ;
- Près de 80% des patients étaient de sexe masculin (78,6%) ;
- L’âge moyen était de 1,4 ± 2,5 ans (près de 1 an et demi) avec des extrêmes [1 mois - 10 ans] ;
- Il n’y a pas de différence significative entre l’âge moyen dans les deux sexes (p>0,05) ;
- 54% des enfants étaient sans antécédents urologiques connus ;
- La dysurie (difficulté à uriner) était le signe fonctionnel le plus fréquent (71% des cas) ;
- La fièvre représentait 68% des signes généraux ;
- Dans 68% des cas, l’examen physique était normal ;
- Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae sont les principaux germes mis en cause (67% des cas) et ont été retrouvés plus fréquemment chez la fille (50% et 33%) ;
- La valve de l’urètre postérieur représentait 67% des cas des uropathies malformatives ;
- 36% des patients ont bénéficié d’une cure chirurgicale à type de résection de la valve de l’urètre postérieur ;
- 86% des patients ont obtenu une guérison avec disparition des signes fonctionnels et un ECBU de contrôle stérile.

Comment comprendre ces résultats
Cette étude nous a permis d’objectiver une faible prévalence des uropathies malformatives comme mentionnée dans la littérature. Cette faible prévalence pourrait s’expliquer par le fait que ces données n’intègrent pas les interruptions médicales de grossesse et les morts foetales in utero, dont 13 à 20 % sont associées à des malformations de l’appareil urinaire.
De nombreuses études épidémiologiques ont montré une fréquence de l’infection urinaire plus élevée chez la fille. Cependant, notre étude comme d’autes similaires menées en Tunisie et au Bénin, avaient retrouvé une prédominance masculine.

Selon la littérature tout comme dans notre enquête, les infections urinaires affectent plus les nourrissons. Ce constat est sans doute lié à la faiblesse des défenses immunitaires dans cette tranche d’âge. Souvent le sevrage opéré à cet âge provoque parfois des carences et une malnutrition, d’où une grande susceptibilité aux infections, plus particulièrement les infections urinaires.
Parmi les entérobactéries qui prédominent le profil des bactéries uropathogènes, E. Coli et Klebsiella pneumoniae étaient les germes les plus rencontrés dans notre série. Ces résultats sont similaires à ceux de plusieurs études. La physiopathologie ascendante de l’infection urinaire ainsi que la forte colonisation du périnée par les entérobactéries d’origine digestive, et en particulier E. Coli, associées aux facteurs spécifiques d’uropathogénicité telles que les adhésines bactériennes expliqueraient cette prédominance.
Coli et Klebsiella pneumoniae ont été fréquemment retrouvés chez les enfants de moins de 3 ans et de sexe féminin dans notre étude. Nos résultats se rapprochent de ceux d’une enquête menée au Togo. Selon une étude, la proximité du tube digestif terminal de l’appareil urogénital associé à un urètre court, expliquerait la prédominance de ces germes au niveau du sexe féminin.
La forte resistance des germes (E. Coli) à l’association amoxicilline-acide clavulanique, aux C3G et à la ciprofloxacine qui est retrovée dans d’autres études, pourrait s’expliquer par l’automédication la forte consommation des médicaments de rue.
C’est l’occasion de rappeller que selon l’OMS, la résistance microbienne aux antibiotiques est l’une des principales causes de décès dans le monde.

Recommandations
Aux autorités sanitaires
- Mettre en place des outils pour le diagnostic précoce des uropathies malformatives.
- Organiser des campagnes de sensibilisation et d’information sur les dangers liés à l’automédication surtout celles des antibiotiques.
Au personnel de santé
- Mettre à jour l’algorithme pour la prise en charge des infections urinaires.
- Rechercher systématiquement une infection urinaire chez tous les patients présentant une fièvre.
- Eviter la prescription systématique des antibiotiques qui favorisent la sélection des souches bactériennes multirésistantes
- Adapter l’antibiothérapie dans la mesure du possible à l’antibiogramme.
A la population
- Consulter un centre de santé devant un enfant présentant une fièvre.
- Eviter l’automédication notamment celles des antibiotiques.
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Thèse souténue par :

Dr YOBOUE Kouassi Joseph, MD
Contact :
(+225) 07 57 252 529
1 Commentaire
Appey boka
il y a 2 ans